Exposition – « Le dessin et l’objet » 2014
Dans le cadre de l’exposition « Le dessin et l’objet » 20 septembre au 22 novembre 2014. Artistes invités: Claire Dantzer l Nicolas Daubanes l Corinne de Battista l Tristan Fraipont l Hyejin KIM l Emilie Lasmartres Maxime Chevallier l Pascal Navarro l Félix Pinquier l Aurore Salomon L’exposition s’inscrit dans la saison de Paréidolie, premier Salon international du dessin contemporain à Marseille, placé sous le parrainage de Bernard Blistène, directeur du développement culturel du Centre Pompidou. Elle ouvre la perspective d’une manifestation annuelle d’envergure autour des spécificités du dessin actuel en Aix et Pays d’Aix. Commissaire de l’exposition Christiane Courbon. Les artistes interrogent les modes d’inscription du dessin dans le dessin actuel, ses supports et ses outils. Si l’expression traditionnelle conserve le plus souvent toute sa place, le trait s’affranchit également de l’espace de la feuille pour frayer avec d’autres dimensions. Qu’il devienne objet, sculpture, installation, projection, image mouvante ou cheminement, in fine, le dessin est l’objet. Compte tenu de la spécificité du lieu, avec son parc aux espèces centenaires, ses quelques 200 m² d’espace d’exposition répartis en pièces distribuées par un long couloir au dernier étage d’une bâtisse édifiée fin 17ème – début 18ème siècle, un dialogue s’instaure nécessairement entre les œuvres et le lieu, entre l’objet créé et l’objet existant. La publication a été confiée à Chloé Curci qui l’a pensée comme un objet hybride aux éléments détachables, ni catalogue, ni livre d’artistes, mais plutôt une création libre autour des œuvres et du lieu, y associant quelquefois des essais sortis de l’atelier. Chaque artiste a choisi celles des œuvres qu’il souhaitait y voir figurer. Des textes, parfois très courts, y sont, à une exception près, associés. Par leur nature, leur densité, leur contenu ou leur absence, rédigés par les artistes eux-mêmes ou participations d’auteurs, ils sont une formulation qui, sans entrer dans l’anecdote ni dans la biographie, parle d’eux, de l’essence de leur travail. Livre-objet, cette réalisation se découvre comme une « nouvelle proposition plus proche de l’œuvre que du répertoire », une balade essentiellement en images avec les photographies que Chloé Curci a prises en explorant les abords immédiats du château et son parc. Une balade, dans laquelle on entre par l’une des allées du jardin de buis, un peu comme on choisirait de se perdre dans un labyrinthe… – Christiane Courbon Claire Dantzer « C’est le milieu du jour, le ciel est sombre. Devant moi, il y a la mer. Aujourd’hui elle est plate, lourde, de la densité du fer. Et sans plus de force on dirait. Entre le ciel et l’eau il y a un large trait noir. Il couvre la totalité de l’horizon. Il est de la régularité d’une rature, géante, de l’importance d’une différence infranchissable. Il pourrait faire peur. Dans la glace de ma chambre, droite, voilée, par la lumière sombre, il y a mon image, je regarde vers le dehors. Les voiliers sont encore là, immobiles, sur la mer de fer, encore dans le mouvement de la course où nous a surpris ce matin l’évanouissement du vent. Je me regarde, je me vois mal dans la vitre froide de la glace. La lumière est si sombre, on dirait le soir. (…) Voici qu’entre l’horizon et la plage, un changement commence à se produire dans la profondeur de la mer. Il est lent. Il arrive avec retard. Contre mon corps, ce froid, de la vitre, cette glace morte. Je ne vois plus rien de moi. Je ne vois plus rien. Ha, si… Je recommence à voir. Devant moi est née une couleur. Elle est très intense, verte. Elle occupe une partie de la mer. Elle retient d’elle beaucoup dans cette couleur là. Une mer, mais plus petite vous voyez, une mer dans le tout de la mer. La lumière venait donc de là, du fond de la mer, d’un trop plein de couleur dans sa profondeur. Et le contrejour venait de son jaillissement de toutes parts aux sortir des eaux. La mer devient transparente, d’une luisance, d’une brillance d’organe nocturne. On dirait non d’émeraude vous voyez, non de phosphore mais de chair. (…) » – Marguerite Duras, extrait de Aurelia Steiner (Vancouver) 1979 Nicolas Daubanes « Je réalise des dessins avec de la limaille de fer. Je considère cet état de matière comme le symbole des traces d’une évasion : en limant les barreaux de la cellule, nous partirons les mains recouvertes de limaille. Ces dessins représenteront des plans ou des vues intérieures de prisons utopiques, imaginaires. Les différentes étapes de réalisation de ce projet doivent être soigneusement suivies : le motif choisi doit être, dans un premier temps, découpé dans une feuille « magnétique » puis disposé sur une plaque de métal ; ce n’est qu’après le dépôt d’une feuille de papier blanc sur le dessin en « découpe » dans la feuille « magnétique », que l’on peut répartir la limaille. Cette « poudre » vient alors se plaquer uniquement sur les surfaces de papier en relation avec les parties magnétisées. Une fois mis à la verticale, le spectateur ne perçoit qu’une surface de papier sur laquelle un nuage de poussière ferreuse vient dessiner un tracé, une forme. Ce nuage peut être plus ou moins épais, plus ou moins épars suivant le mode d’application. L’aimantation pose le dessin en suspension, lorsque la feuille est séparée des aimants ce dernier disparaît, la poudre de métal tombe en ne laissant aucune trace sur le papier. De ce fait le dessin est par nature éphémère, comme si le motif représenté ne devait être visible qu’un temps donné. Même sans l’idée du décrochage du papier et donc de la chute « provoquée » du métal, le dessin a une durée de vie limitée à quelques dizaines d’années. L’aimantation perdant 2 à 3% par an de sa force d’attraction, le motif se perdra au fur et à mesure … Plus le motif disparaît plus la représentation carcérale est fragilisée, plus l’évasion est envisageable. Lorsque un détenu planifie son évasion, son projet doit rester uniquement dans son esprit pour demeurer totalement clandestin, aucune inscription ou gravure ne lui sont permises. Mon mode de représentation doit être en
